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HISTOIRE  du YEMEN

  ACTUALITE : les dernières nouvelles
 

Tableau récapitulatif
- Origine : Origine et définition de l' "Arabie Heureuse" : de la Bible à la Préhistoire
- Xe s. avJC - Ie s. apJC : Les Royaumes caravaniers (Saba, Ma'in, Qataban, ...)
- Ie s. - IIIe s. : Fin des royaumes caravaniers et naissance d'Hymiar
- IVe s. - VIe s. : Hymiar et l'occupation éthiopienne
- VIIe s. -VIIIe s. : Arrivée de l'Islam
- IXe s. - XVIe s. : Epoque des dynasties et naissances de l'Imamat zaydite
- XVIe s. - XVIIe s. : Première occupation turque
- XVIIe s. - XVIIIe s. : Commerçants et explorateurs au Yémen
- XIXe s. - début XXe s. : Arrivée des britanniques et seconde occupation ottomane
- De 1918 à 1962 : Le Yémen au XXe s : vers la révolution
- De 1962 à 1990 : de la Révolution à la Réunification
- Depuis la réunification en 1990 : entre troubles et stabilité
- Actualités : depuis le 11 septembre 2001

        REPERES CHRONOLOGIQUES



Origine et définition de "l'Arabie Heureuse" : de la Bible à la Préhistoire :

La racine YEMEN en arabe signifie à la fois "à la droite" et "heureux". Ainsi, par étymologie, se trouvent réunis "le pays à la droite" (par rapport à la MECQUE) et l'Arabie Heureuse des Anciens. Pline, Dion Chrysostome, Ptolomée, Ovide dans ses Métamorphoses ou Malraux plus près de nous, se sont intéressés, tantôt fascinés, tantôt effrayés, à l'Arabie Eudoimon : l'Arabie Heureuse.
Cette grande pourvoyeuse d'aromates et d'essences sacrées se consumant en hommage à d'innombrables Dieux, est le lieu de théophanies prestigieuses, nourries à la fois d'ignorance et d'affabulation. La mythologie y trouve matière à son cérémonial, la connaissance pas.
Le relief accidenté, les hautes montagnes inaccessibles, ont facilité la naissance et le développement d'une civilisation originale. La mousson qui s'abat deux fois l'an sur les massifs montagneux a permis à des agriculteurs sédentaires organisés en tribus et parlant le sudarabique, de vivre et de se reproduire.

   Il faut remonter au premier Livre de l'Ancien Testament pour retrouver trace de l'origine du Yémen : les sudarabiques descendraient de Qahtan, fils de Sem et petit-fils de Noé, tandis que les populations nord-arabiques auraient comme ancêtre commun Adnan, autre fils de Sem et petit-fils de Noé (Gen 10,2).
Le peuplement de la péninsule arabique est certainement très ancien. Les récentes fouilles archéologiques ont mis en évidence des sites pré- et protohistorique au Yémen. Aucune occupation paléolithique n'a été réellement datée, mais les découvertes néolithiques sont nombreuses, localisées aux contours du Ramlat as Sabatayn, la région de Saada, des vallées du Jawf et du Hadramaout, et correspondent au second épisode humide du quaternaire (entre 8000 et 5000 ans).
D'importantes nécropoles datées du IIIe millénaire av.JC. et constituées de milliers de tombes en pierre ont été découvertes dans la région du Jawf-Hadramaout (nord de Ma'reb), sur la frange du Rub'el Khali. 
Le potentiel archéologique du Yémen reste important et le pays est encore peu fouillé, mais les terrains de recherches se situent souvent dans des zones tribales à l'accés difficile.




Xe siècle avJC- Ier siècle apJC: Les royaumes caravaniers, naissance d'une grande civilisation Sud-Arabique

A partir du IIe millénaire avant notre ère débute la période du Yémen antique.
Au VIIIe s. avant notre ère, l'Arabie, carrefour entre l'Inde et les empires grecs et romains, connaît déjà une intense activité commerciale, commencée certainement bien avant le début du Ier millénaire av.JC. Les marchandises en provenance d'Inde (aromates, tissus, pierres précieuses) ou produites sur place (myrrhe, encens, aromates) étaient ensuite convoyées à travers le désert jusque dans le bassin méditerranéen. Tout un tas de cités vont ainsi prospérer le long de ces itinéraires commerciaux nommés aussi " Routes de l'Encens ".
Les monuments les plus archaïques de ces cités se situent à Sirwah, à Ma'reb, dans le Jawf, et dans le Hadramaout. Mais de toutes les cités caravanières situées le long des routes commerciales, seule Ma'reb, capitale de Saba est une véritable ville.

Le royaume de Saba : VIIIe s. avJC - VIe s. apJC
Le premier Etat sabéen est apparu vers 1500 avJC. Cet Etat s'étendait du Jawf au Hadramaout actuel.
Une inscription assyrienne datée de -715 fait état d'un droit de douane que payait alors le roi sabéen Yita Amar à Sargon II pour le transit de ses marchandises par le port de Gaza, alors contrôlé par les Assyriens. Une autre inscription de -685 rapporte aussi que le roi sabéen Karibilu envoyait des présents à son homologue assyrien en signe d'amitié et d'alliance. Mais le témoignage le plus célèbre de ce passé sabéen est relaté dans la Bible (Rois), et repris dans le Coran, à travers le mystérieux personnage de la Reine de Saba (Xe s.avJC) qui entretint pendant des siècles le mythe de ce royaume.

La puissance du royaume de Saba se fonde sur le contrôle des pistes caravanières. Les Sabéens sont alors les maîtres du commerce : des caravanes de parfois 3000 chameaux entretiennent un trafic incessant vers la Méditerranée et la Mésopotamie, transportant myrrhe, encens et aromates du Yémen, et tissus et pierres précieuses d'Inde.
Leur autre grande réussite réside dans la maîtrise des techniques d'irrigation qui permet le développement de l'agriculture dans de vastes oasis. Leur plus remarquable construction est certainement le fameux barrage de Ma'reb, édifié au VIes avJC, long de 650m et large de 60m, retouvé par l'explorateur Arnaud en 1843. On sait aussi qu'ils construisaient déjà de hautes maisons à étages.
Les sabéens sont donc sédentaires. Ils sont gouvernés par un roi ou une reine et le peuple peut désigner des représentants. L'Etat sabéen est constitué d'une confédération de tribus dont le ciment est le culte du Dieu Almaqah, dieux du soleil et de la Lune, proche des croyances des Babyloniens. Ils parlent une langue sémite sud-arabique, dont la première trace d'écriture est datée du VIIes avJC.

Dès le IXes avJC, les Sabéens installent des comptoirs de l'autre côté de la Mer Rouge, contrôlent l'Erythrée, remontent le Tigré, fondent la ville d'Axoum (où l'on retouve l'influence sabéenne dans l'architecture) et créent ainsi le premier Etat africain.
Au VIes avJC, ils pénètrent en Ethiopie et en Afrique Orientale et fondent As Saba, l'actuel port d'Assab en Erythrée.

Trois autres petits Etats se sont constitués autour de Saba : l'Etat Minéen avec comme capitale Maïn, Qataban avec comme capitale Tamna, et le Hadramaout avec comme capitale Shabwa. Ces Etats périphériques sont restés alors vassaux ou alliés de Saba. Mais dès le Ves avJC, ils deviennent des rivaux directes de leur puissant voisin.
Peut-être ce premier Etat Sabéen commence-t-il à éclater sous l'effet de ces forces centrifuges, aux alentours du IVe siècle avant J.C.  Les Etats de Ma'in, Qataban et Hadramaout profitent de cet éclatement pour s'émanciper. Ces trois nouveaux Etats désirent alors contrôler les routes caravanières et affirmer leur indépendance vis-à-vis de Saba.
Mais le royaume de Saba reprendra le contrôle sur ces Etats voisins dès le IIe s. avJC et perdurera jusqu’au VIe s. de notre ère, date de la destruction du barrage de Ma'reb.

Le royaume de Ma’in : IVe s. avJC - 120 apJC
Ma’in fut un petit royaume s’étendant dans l’actuel Jawf (ouest de Ma'reb). Il eut comme capitales successives Ma’in et Yathil (actuelle site de Barraquish). Rapidement, il parvient à prendre le contôle d'une bonne partie des routes caravanières et l'on trouve des traces de Minéens dans tous les royaumes voisins (Hadramaout, Qataban,...), mais aussi dans le bassin méditerranéen, en Egypte, en Palestine, en Phénicie, Grèce et en Syrie. Le royaume de Ma’in est à son apogée aux alentours du IIe s. avJC, avant que Saba ne rétablisse son autorité.
Contrairement à leurs voisins, les Minéens n’étaient pas des militaires et administrateurs, mais un peuple de commerçants, spécialisé dans l’organisation des caravanes.

Le royaume de Qataban : VIIe s. avJC - 175 apJC.
Le royaume de Qataban, avec sa capitale Tamna (actuelle Hajar Kuhlan), était établi dans le wadi Bayhan, au sud-est de Ma’reb. Il vécut son apogée aux III et IIe s. avJC

Le royaume du Hadramaout : Ve s. avJC - Ve s. apJC.
La capitale du Hadramaout, Shabaw, se situait à l’ouest de l’actuel wadi Hadramaout. Le royaume ne vivait pas simplement du contrôle des caravanes car la région était aussi productrice d’encens et de myrrhe. Le Hadramaout connut son apogée au Ier s. apJC. Il sut tirer profit du remplacement des voies terrestres par des voies maritimes grâce à son port Qana (actuel Bir Ali), contrairement aux autres royaumes de Qataban, Saba et Ma’in, encore limités au transport terrestre.

Ces quatre Etats vont se livrer d'incessantes guerres pour le contrôle des routes caravanières. A la fin du IIes avJC, Saba a repris le contrôle sur les Minéens et Qataban. Mais la réputation de la richesse de ces royaumes, décrite par Strabon, traverse bientôt la Méditerranée pour alerter un nouvel empire alors en pleine expansion : Rome.




Ier siècle - IIIe siècle après J.C. :  fin des royaumes caravaniers et naissance d’Himyar

Rome succède aux Sélénides en Syrie (64 avant J.C.) et aux Lagides en Egypte (30 avant J.C.) et souhaite contrôler les voies d'acheminement et les régions productrices d'encens et de myrrhe. Aelius Gallus, alors gouverneur d'Egypte, tente sur ordre d'Auguste en 24 avant J.C., une expédition en Arabie du sud. Avec une armée de 10000 hommes, guidé par des Nabatéens, il échoue lamentablement un an plus tard près de Ma'reb, face à une armée unie de Sabéens et de Hadramis. D'après la légende, ses guides l'auraient trahi et abandonné. La plupart des soldats meurent égarés et peu rejoindront l'Egypte.
Mais malgré son échec, l'expédition romaine aura des conséquences désastreuses pour certains Etats sudarabiques. Au Ier s., le grec Hippalos fit connaître le régime des moussons qui facilite le transport maritime : les romains vont s'approvisionner désormais par voie de mer et non plus de terre. Ma'in, Saba et Qataban connaissent alors de graves difficultés. Ma'in disparaît même, alors que le centre de gravité des royaumes de Saba se déplace vers Sana'a (que les sabéens fondent au Ier s.).
Le Hadramaout, au contraire, profite de ce nouveau commerce maritime.
Au début de notre ère, il ne reste des royaumes caravaniers que Saba, Hadramaout, et dans les montagnes le nouveau royaume d’Himyar qui s’imposera rapidement.
Himyar était jusqu'alors un royaume vassal de Saba, situé dans la partie sud des Hauts Plateaux. Les Himyarites renouvellent l'art de la guerre avec la cavalerie. Ils chassent d'abord les Abyssins de la côte, puis s'emparent sans difficultés de Qataban.
Après une guerre contre Saba qui dura de 280 à 295, le roi himyarite Shamir Yuhar'ish unifie l'Arabie méridionale, y compris le Hadramaout, à l'exception du littoral de la Mer Rouge sous contrôle éthiopien, et déplace la capitale à Dhafar (près de l'actuel Yarim).
Shamir prend le titre de "rois de Saba et de Dhur-Raydan", ce qui signifie "rois de Saba et d'Himyar" : cette unification dessinera les limites du Yémen telles que nous les connaissont aujourd'hui.




IVe s. - VIe s. : Himyar et l'occupation éthiopienne :

Au IVe s., le royaume d’Himyar affirme sa suprématie sur l'ensemble de l'actuel territoire yéménité. Mais son nouvel ennemi évolue de l'autre côté de la Mer Rouge : il s'agit du puissant royaume d'Ethiopie..
En 360, la dynastie himyarite se convertira au judaïsme, sans doute en réaction à la conversion au christianisme du roi Ezana d'Ethiopie. Himyar entend ainsi résister à l'hégémonie chrétienne en Mer Rouge, née de la collaboration entre Rome et l'Ethiopie, et affirmer aussi son indépendance face aux deux puissances de l'époque, Byzance et la Perse Sassanide.
Au Ve s, des groupes chrétiens s'implantent au Yémen (Najran, Hadramaout), en relation avec l'Ethiopie et Byzance.
En 518, le roi juif himyarite Youssouf As'ar Yathar, dit Nuwas, massacre des milliers de chrétiens yéménites et incendie les églises (à Najran et dans le Hadramaout). La réaction des chrétiens éthiopiens est immédiate. En 525, après une conquête, le Négus éthiopien Ella Asheba, poussé par Byzance qui fournit la flotte, vassalise le Yémen en plaçant sur le trône un Himyarite chrétien, Abraha. Nuwas, vaincu, se suicide en se précipitant avec son cheval dans la mer. Le christianisme devient religion officielle du Yémen. Le roi Abraha (542-553) construit la cathédrale de Sana’a sur l’emplacement d’un ancien temple païen (correspondant à l'actuelle Grande Mosquée. Quelques chapiteaux de cette cathédrale, marqués d'une croix, ont été réutilisés pour la construction de la Grande Mosquée est y sont encore visibles). La légende raconte aussi que Abraha se rendit à La Mecque avec une armée d’éléphants (évennement cité dans la Sourate 105 "L'Elephant").

Mais le particularisme yéménite l'emporte à nouveau et la dynastie chrétienne s'émancipe de la tutelle éthiopienne. En 560, Saïd ibn Dhi Yazan organise la lutte : il conduit une guerre victorieuse contre l'occupant abyssin et redonne au pays, en 575, son indépendance relative.
Mais le désordre règne dans le royaume : cette même année 575, devant l'anarchie et l'absence d'Etat fort, les chefs féodaux font appellent aux Perse Sassanides. En lutte contre Byzance alliée de l'Abyssinie, la Perse combattait aux cotés du Yémen. Le Yémen sera alors administré par un gouverneur perse. Le roi perse Chrosoès se rendit à Aden et à Sana’a où il fit abattre une porte de la vieille ville pour y faire passer ses bannières debout.

En plus d'une crise politique, le royaume de Himyar traversait alors une période de crise économique suite à la baisse du commerce terrestre au profit du commerce maritime contrôlé par les romains d'Orient. De plus, la chute du paganisme entraina une forte diminution de la consomation d'encens. En 570, le royaume de Saba sous tutelle himyarite, incapable d'entretenir ses installations hydrauliques qui lui a permit de survivre dans le désert, disparaîtra suite à l'effondrement de son barrage de Ma'reb. Les populations de ces anciens royaumes caravaniers vont fuire et s'installer à Yathrib (Médine), à Hira (Irak), dans la région de Damas, à Barhein, ...

L'année 575 marque ainsi l'invasion du Yémen par les Perses, mais surtout la disparition définitive de la civilisation sud-arabique. Même la langue sera remplacée par l'arabe du nord. On assiste alors à une "bédouinisation" de la société. Mais les yéménites, hostiles à l'occupation perse, vont rapidement trouver grâce à la nouvelle religion et son prophète Mohammed, un nouveau prétexte d'émancipation.




VIIe s. - VIIIe s. : L'arrivée de l'Islam :

Très tôt, Mohammed le Prophète, le Sceau de la Prophétie, regarda en direction de la droite, le Yémen.
L'Arabie, à la veille de l'Islam, connaissait en dépit d'une importante segmentarité, une certaine unité due essentiellement à la diffusion du dialecte de la tribu des Quraysh et aux relations commerciales entre ses différentes parties.

Les Yéménites jouèrent un rôle particulier et de première importance dans la diffusion de l'Islam. Lorsque le prophète Mohammed en butte à l'hostilité des Mekkois, décida de se rendre à Médine, il le fit à l'invitation des Aws et des Khazraj, branches de la tribu des Qayla, originaires du Yémen. Grâce à l'aide de ces tribus et des autres ralliements, il allait combattre les Mekkois et faire bientôt de la Mecque le coeur de la nouvelle foi.
A l'égard du Yémen, ses objectifs étaient doubles : s'emparer de la région la plus riche, la plus peuplée et la plus civilisée de la Péninsule Arabique, s'assurer le contrôle d'une des artères principales du commerce international par laquelle transitaient les produits de l'Inde. Diplomate ou reconnaissant, le Prophète aurait affirmé " La foi est yéménite, la sagesse est yéménite"

Selon la légende véhiculée par de nombreux chroniqueurs, les yéménites se seraient convertis tous à la nouvelle foi en l'espace d'une journée. Sans doute de tels témoignages sont soit apocryphes, soit peu dignes de confiance car non dénués d'arrière-pensées. En effet, à cause du système de rétribution instauré par le Calife Omar, qui avantageait les premiers convertis, les Yéménites se disaient sans doute tous des musulmans de la première heure.

En fait, il semble que la conversion soit intervenue après celle de Baydhan, gouverneur persan du Yémen, vers l'an 628. Ce ralliement constituait une trahison envers son Empereur. La "petite histoire" raconte que l'Empereur de Perse, furieux du message envoyé par Mohammed qui le conviait à embrasser l'Islam, intima l'ordre à son vassal de faire escorter jusqu'à la cour impériale l'auteur de la missive irrespectueuse. Mais lorsque les agents de Baydhan arrivèrent à Médine, ils furent reçus par le Prophète qui leur dit : " Faites savoir à votre maître que cette nuit , mon Seigneur tuera le sien ". La nouvelle de l'assassinat de l'Empereur par son fils vint confirmer la prédiction. Baydhan crut en lui et embrassa l'Islam. En fait, Baydhan aurait choisi l’Islam pour arbitrer les luttes incessantes entre juifs et chrétiens.

Les conversions tenaient essentiellement à l'histoire locale : luttes tribales, à leur manipulation par les musulmans,... Les arabes du nord imposèrent souvent l’Islam par la force et enrôlaient les yéménites dans la nouvelle armée islamique. Le Yémen fournissaient ainsi à Mahommed des troupes et une profondeur stratégique. Les combattants yéménites participeront ainsi aux batailles contre les Perses d'Irak, les Byzantins de Syrie, et à la fondation de Koufa.

Dès que le Yémen devint musulman, celui-ci fût divisé en trois Mikhlaf ou province :
- le mikhlaf de Sana'a
- le mikhlaf de Janad (près de Taëz)
- le mikhlaf du Hadramaout

Comme toutes les régions converties, le Yémen restera sous l'autorité et l'administration des deux premières dynasties successives des premiers temps de l'Islam : les Ummaydes (basés à Damas) puis les Abbassides à partir de 750 (basés à Bagdad).

- Sous les Umayyades (662-750) : après une conquête fulgurante des armées de l’islam, la dynastie Umayyade prend le pouvoir et s’installe à Damas. L'Arabie du Sud est alors administrée par un gouverneur nommé par Damas. Vers la fin du règne de cette dynastie, le Hadramaout en proie à la propagande Kharijite ibadite se révolte, mais sera maté par les armées umayyades. Durant cette période, Aden devint un grand entrepôt de commerce.

- Les Abbassides, en 750, mené par Abbas, chassent les Umayyades et installent le pouvoir en Irak. En 758, le calife  Mansour fonde Bagdad et en fait la nouvelle capitale du califat. Les Abbassides rétablissent l'ordre au Yémen et très vite, le pays retrouve une certaine prospérité. Mais loin de Bagdad, le Yémen échappe de nouveau au pouvoir califal : sur les Hauts Plateaux, une multitude de petits royaumes yéménites se succèdent ou s’affrontent pour administrer des territoires aux dimensions variables, tandis que dans le Hadramaout commence une période de 3 siècles de prospérité et d'active vie intelectuelle (Shibam, Tarim et As Shihr).




IXe s. - XVIe s. : Epoque des dynasties et naissance de l'Imâmat zaîdite :

Après la conversion à l'Islam et tout au long des 7 siècles qui suivront, des dynasties se succéderont sur des territoires plus ou moins étendus, en proie à des luttes de pouvoir et des velléités d'extension territoriales, surtout sur les Moyens-Plateaux et les plaines côtières  :

- Ibn Ziad, dernier gouverneur abbasside, se proclame indépendant. Il fonde la dynastie Ziadite et la ville de Zébid en 819 (Tihama). Cette dynastie régnera sur la ville jusqu'en 1012 et le sultanat de Zébid sera indépendant jusqu’au XIIes.

- Quelques années plus tard, appelé par les tribus locales, Yahya ibn Hussein s'installe à Saada avec une cinquantaine de membres de sa famillle, tous descendants du Prophète (Sayyds). Hussein descend de Zayd, arrière petit-fils d'Ali et fils du quatrième Imam Ali Zayn an Abidin. En 898, il se proclame Imam sous le nom de al Hadi Illa al Haqq et fonde ainsi la dynastie zaydite. D'abord à Saada puis à Sana'a, la dynastie Zaydites (898-911 à Sana'a, Saada et Taêz) gouvernera le Yémen des Hauts Plateaux de 898 à 1962 sous un régime théocratique shiite et sur un territoire plus ou moins grand.
Aujourd'hui, le zaydisme est l'une des écoles de l'Islam schiite et est l'un de ses courants les plus modérés (cf Religion).

- Yu'fir fonde la dynastie Yu’firid en 872 à Shibam (Nord). Son territoire s’étendra aux nord du Yémen. Il sera opposé aux Zaydites à Sana’a.

- Les Qarmates (906-915) : secte née en Irak au IXe s., les missionnaires qarmates arrivent au Yémen en 884 (ils donneront naissance aux Ismaëliens plus tard). Ils prennent Sana’a en 906 et envahissent une bonne partie du nord Yémen mais pour une courte période.

- Les ismaëliens Sulayhids (1047-1138), célèbres grâce à leur reine Arwa, feront de Jiblah la capitale du Yémen pendant une courte période.
On peut citer aussi, à la même époque, deux éphémères dynasties : les Banu Zuray (1078-1174 à Aden) et  les Bani Hatim (1099-1174 à Sana'a).

- En 1174, en raison de la situation anarchique qui règne au Yémen, les chefs yéménites sollicitent le Ayyubide Saladin, le "libérateur de Jérusalem" qui fonda la dynastie Ayyubide en Egypte. Celui-ci envoit son frère Turaushah lutter contre les Zaydites. Le conquérant kurde s'empare de Zébid, d'Aden puis de Sana'a et enfin du Hadramaout en 1179 et impose une dictature (1174-1229). Mais il ne parvint jamais à soumettre totalement les Hauts Plateaux et le Hadramaout.

- En 1229, les Rasudides (1229-1454) (Rasul en arabe veut dire Prophète, Envoyé), yéménites ayyubides, s’émancipent de leur ancienne tutelle. Zébid qui était leur capitale, connut un essor prodigieux et devint un centre religieux et intellectuel de première importance. Les Rasulides entretenaient des relations avec toutes les Cours orientales : Dahlak, Delhi, Le Caire, Bagdad, Ceylan. Ce règne, qui dura 225 ans, fut le plus brillant de l'histoire du Yémen musulman. Seuls les Hauts Plateaux échappèrent à leur emprise.

- Au sud et à l’est, Amir ibn Tahir crée la dynastie des Tahirides (1454-1517). Ils prennent le pouvoir dans le Yémen inférieur (Tihama) en 1454, puis Sana’a en 1504. Les turcs leur reprendront Zébid et Aden en 1516.

- Dans le Hadramaout, une tribu originaire de la région de Sana’a s’installent en 1488. Elle fonde la dynastie Kathiride qui régnera sur le Hadramaout jusqu’en 1967.




XVIe s. - XVIIe s. : Première occupation turque :

   Vers la fin du XVe siècle, le Yémen connaît une certaine prospérité qui attire les puissances étrangères de l'époque. Les Portugais grâce à leur guide yéménite Ibn Majid, tentent de pénétrer dans l'Océan Indien en contournant l'Afrique, remplaçant les voies commerciales terrestres d'Arabie par de nouvelles voies maritimes. Ce danger risquait de faire perdre aux Ottomans les bénéfices d'un commerce lucratif, et conduisit donc ces-derniers à intervenir au Yémen par le biais des Mamelouks d'Egypte. Ils conquièrent Zébid, alors aux Tahirides, et fondèrent l'état circassien du Yémen (1516-1538).

En 1538, l’armée ottomane de Soliman débarque à Aden et, après neuf ans de guerre, prend Sana'a  en 1547 : commence alors la première occupation Ottomane. Mais les conquérants auront à affronter tout le temps de leur occupation, la résistance des yéménites.
Al Mutahhar chassera les turcs de Sana'a en 1566. De nouveaux renforts turcs sont envoyés au Yémen. Quelques années plus tard, Al Mutahhar meurt et les Ottomans profitent de l'incertitude autour de sa succession pour pousser leur invasion vers le nord : le Yémen semble alors perdu.
En 1598, al Qacim ben Mohammed est proclamé Imam et appelle à la résistance et à l'union de tous les yéménites : le pays se trouve ainsi réuni sous l'autorité zaydite. Les turcs se livrent alors aux pires excés, mais ne peuvent contrôler la résistance : en 1629, Sana'a et Taêz sont libérées. Les turcs ne sont installés qu'entre Mokha et Zebid sur la Tihama.
En 1636, les Ottomans sont contraints d'évacuer tout le Yémen. La capitale est fixé à Sana'a et le pays connaît un nouvel âge d'or grâce au commerce du café, surtout sous al Moutawakkil (1644-1676).

Jusqu'en 1849, le pays resta indépendant des puissances étrangères, sous le régime de l’imamât zaydite.




XVIIe s. - XVIIIe s. : Commerçants et explorateurs Européens au Yémen :

Ce pays situé à la jonction des plus importantes routes commerciales de l'humanité, carrefour des carrefours entre les immensités asiatiques à la démographie incandescente et la vieille Méditerranée, fut depuis les temps immémoriaux objet d'âpres luttes d'influence entre grandes puissances du moment.
Hier incursions chinoises ou indiennes, Byzance, la Perse, l'Abyssinie ou l'Egypte, le Portugal, plus près de nous l'Egypte encore, l'Arabie Saoudite, l'Empire Ottoman, l'Angleterre et le Canal de Suez, puis les U.S.A. et l'U.R.S.S., encore et toujours Suez et Bab El Mandeb. Aucun grand Empire, aucune grande entreprise territoriale à l'échelle de la planète qui n'est eu la tentation du Yémen.

Dès le milieu du XVIIe , le commerce et les échanges entre l'Inde et l'Europe s'intensifient. LeYémen, au centre des routes commerciales, profite de sa position stratégique. L'Imam protège les routes et renforce les ports de Moka, Aden et Mukalla. 
Fin XVIIe, Moka est déjà un port riche grâce au café, cultivé sur les hauts-plateaux puis transitant par Moka. Consommé depuis le XVe, le café est introduit au Caire dès le XVIe puis répandu dans tout l'empire Ottoman. La mode de ce nouveau breuvage attire les hollandais puis les anglais. La France, qui jusqu'alors commerçait par l'intermédiaire des marchands marseillais via le Caire, envoie une première expédition d'armateurs malouins à Moka en 1701. En 1711, une seconde expédition noue de solides liens commerciaux entre le Yémen et la France.
A partir de 1737, suite à l'engouement croissant des Européens pour le café, les Hollandais puis les Français installèrent des comptoirs à Mokha et la France ouvrit même une agence consulaire. Ce fut le début d'une période d'échanges fructueux entre le Yémen et l'Europe avec l'Egypte comme intermédiaire, qui devait durée deux siècles pour s'achever au milieu du XIXe siècle, avec l'arrivée de la concurrence du café africain et américain.
Pendant toute cette période, le Yémen est prospère et stable : l'Etat centralise le pouvoir et réduit le rôle des chefs tribaux, le pays dispose d'une armée permanente, l'Imam détient les pleins pouvoirs sur un vaste territoire s'étendant de Najran au nord à Aden au sud, de la mer Rouge à l'ouest au Dhofar à l'est (sensiblement le Yémen actuel).

En 1762, le danois Carsten Niebhur lance la première expédition scientifique au Yémen, qui reste encore aujourd’hui une réfrence.

Le Hadramaout situé sur la route des Indes sera l'objet de luttes incessantes entre conquérants avides, et les Portugais échouèrent deux fois devant Aden.

Début XIXe, le pouvoir central s'affaiblie, les roitelets s'émancipent progressivement. La concurrence du café africains et américains provoque une crise du café au Yémen. Moka péréclite progressivement au profit de Aden, jusqu'à alors petit port sans importance. 




XIXe s. - début XXe s.: L’arrivée des britanniques et la seconde occupation ottomane :

La concurrence géopolitique entre français et anglais dans la région est très forte : le 1er janvier 1839, les anglais s'empare militairement de Aden. Très rapidement, ils contrôlent le détroit de Bab el Mandeb et gouvernent les provinces du sud et de l’est du Yémen : c’est le début de la séparation du Yémen en deux. Les Anglais resteront au Yémen (sud) jusqu’en 1967.

En 1849, les turcs prennent Sana'a mais sont contraints de se retirer à Al Hoddeidah. C'est le début de la seconde occupation ottomane. Dès lors et jusqu'au traité de Da'an de 1911, les turcs et les forces de l'Imam vont s'affronter.
Vus les intérêts régionaux, en 1854, les puissances de l'époque (turcs, anglais, français, égyptiens) s'activent pour percer le canal de Suez qui sera effectivement ouvert en 1869. Les turcs en profitent alors pour amener des renforts au Yémen et reprendre Sana'a en 1872.
En 1890, le nouvel Imam Mohamed ibn Yahya Hamid al Din veut chasser les turcs et rétablir le pouvoir. Les combats entre les deux camps redoublent d'intensité et ne vont pas cesser : dès 1892, la garnison turque de Sana'a est assiégée et la route de Hoddeidah coupée. Fin 1893, le siège est levé et une trentaine cheikhs de la Tihama sont exécutés. En 1898, un bataillon turc est exécuté. Début XXe, les turcs ne contrôlent que les principales villes, mais la rébellion s'accentue encore.
En 1904, l'Imam Mohamed meurt et est remplacé par son fils Yahaya. Celui-ci est cultivé et respecté. Il réussit à mobiliser l'ensemble du pays contre l'occupant : tout le Yémen est alors en insurrection. 
 A partir de 1905, l’armée de Yahya reconquit progressivement le pays. En mars de la même année, un renfort turcs de 10000 hommes est assaillis à 10km à l'ouest de Sana'a. Le 20 avril, Yahya entre dans Sana'a libérée.
Un mois plus tard, en mai 1905, les turcs décident de frapper fort : ils envoient 50000 hommes qui reprennent le contrôle de Hoddeidah, Taez, Manakha et enfin Sana'a qui tombe le 1er septembre. Yahaya se réfugie alors dans la forteresse de Shahara (au nord, entre Amran et Saada) : jamais la forteresse ne tombera et l'armée turque subira encore de lourdes pertes. 
En 1909, les Jeunes Turcs au pouvoir décident d'une trêve avec l'Imam.
En 1911, Yahaya lance sa deuxième grande insurrection : toutes les garnisons du pays sont attaquées. En mai de la même année, les accords de Da'an reconnaissent l'Imam et place le Yémen sous suzeraineté de l'Empire Ottoman.

Dans les sud, la rebellion de Yahya inspire le sultan d'Aden Mohamed Saïd Ali qui se rebelle contre les anglais en 1897.

En 1911, l'Italie déclare la guerre à la Turquie et bombarde les ports yéménites sous contrôle turcs, de Hoddeidah, Khawkha, Cheikh Saîd et surtout Moka.

En 1914, alors qu'éclate la première guerre mondiale, le Yémen reste neutre et rejette la proposition d'alliance avec les britanniques. Les dernières troupes turques quittent alors définitivement le Yémen en mars 1919.




 Le Yémen au XXes. : vers la révolution :

la guerre yéméno-saoudienne :
Les britanniques, au sud, s'inquiètent de la situation dans le nord et des répercussions à Aden suite à  l'émancipation de Yahya. Leur politique régionale dans les années 20 sera donc de déstabiliser la position fragile du Yémen du nord. Dès la fin de la première guerre mondiale, ils encouragent la sécession de Al Idriss dans l'Asir (limite Yémen-Arabie Saoudite). Mais en 1924, les yémenites réoccupent la région.
Toujours en 1924, encore un peu plus au nord, Ibn Seoud, soutenu par les anglais et les américains, chasse les Haschémites de La Mecque et reprend l'Asir aux yéménites.
Le Yémen cherche alors des appuis  qu'il trouve avec l'Italie (1927, qui fournit armement et pilotes) et l'URSS (1928). Les affrontements entre l'armée yéménite et saoudienne sont alors nombreux.
Le 7 avril 1934, Séoud déclare officiellement la guerre. Les  troupes yéménites et saoudiennes s'affrontent pour la première fois à Najran. Le 5 mai, les saoudiens entrent dans Hoddeidah : les flottes italienne et française arrivent sur les lieux, les britanniques sont présents à Kamaran. La situation est politiquement très tendue. Les saoudiens sont priés de quitter Hoddeidah en échange d'un retrait des troupes yéménites de Najran.
Le 20 mai 1934, le traité de Taïf est signé : le Yémen perd l'Asir, Jizan et Najran, soit 200.000 km² de terre. Cette région a fait longtemps l'objet d'un contentieux qui ne fut réglé qu'en 2000.

les débuts de l'opposition yéménites : 
Dès la fin des années 30, des mouvements d'opposition à l'Imam font leur apparition au Yémen. Une confrérie, appelée Mouvement des Yéménites Libres, est créée en 1946. Elle réunit de nombreux opposants, notamment chez les militaires, les commerçants et intellectuels, et est même soutenu par l'un des fils de l'Imam, bien que leurs intérêts soient très divergents. Ils décident d'assassiner Yahya.
Après un premier échec en janvier 1948, l'Imam Yahya est assassiné par les "Yéménites Libres" le 17 février près de Sana'a. Ces derniers placent Abd Allah Ibn Ahmad al Wazir comme nouveau dirigeant du pays. Mais le conflit est mal préparé et presque aussitôt, le fils de l'Imam déchu, Ahmed, organisa une contre-révolution et pilla Sana'a. Al Wazir fut exécuté, et Ahmed (Ahmed Hamid ad Din de son vrai nom)  devint le nouvel Imam zaydite. Il s'installa à Taëz jusqu'en 1962, date de sa mort naturelle.(cf Ahmed à Taez, pour découvrir la personnalité très étrange de ce personnage !)
Ahmed noue des liens très étroits avec Moscou, qui livre des chars, et la Chine, qui construit le réseau routier du pays. (Ahmed méfiants, aurait enfermé les chars dans un hangar dont il gardait toujours la clé avec lui !)

 L'Imam réprime des révoltes en 53, puis un soulèvement en mars 55 des "Yéménites Libres" qui voulaient instaurer une république. De nombreux étudiants et élèves officiers yéménites, issus de l'université de Damas, sont acquis aux thèses du Baas et du nationalisme arabe. Très actifs à Aden, ils y fondent des syndicats et des mouvements républicains clandestins, qui réunissent aussi les anciens "Yéménites Libres".




 1962-1990 :  de la révolution à la réunification

Le 18 septembre 1962, l'Imam Ahmed meurt à Taez. Son fils Al Badr déplace la capitale à Sana'a et veut entreprendre des réformes libérales.
Les républicains clandestins profitèrent de la passation de pouvoir pour orchestrer un coup d'Etat le 26 septembre 1962. L'egyptien Nasser soutient la révolution et envoie plusieurs milliers d'hommes à Hoddeidah dès le 29 septembre.
L'Imam parvint à s'échapper et à rejoindre les tribus du nord. Il obtient de son côté le soutient des Saoudiens. Une guerre civile impitoyable se déroulera ainsi sur le sol yéménite pendant près de 8 ans : les républicains détiennent Sana'a, Taez, Hoddeidah et la Tihama, les royalistes occupent les montagnes du nord et de l'est.
Au sein de l'armée républicaine, les divisions sont nombreuses entre les nassériens, les gauchisants et les modérés, et les tensions sont fortes avec les officiers égyptiens. Nasser se retire le 23 aout 67.
Le 1er décembre 67, suite à une grande offensive, l'armée royaliste assiège Sana'a pendant 70 jours. Une colonne de blindés et 1000 hommes volontaires du sud, emmené par Saleh (actuel président du Yémen) brise le siège le 8 février 68.
Al Badr fuit en Arabie Saoudite le 8 mars 69. Un accord de cessez-le-feu est signé le 24 mars 70 et la République Arabe du Yémen est reconnue en juillet de la même année. La guerre civile aura coûté la vie de 200 000 personnes.

Dans le Sud, les Anglais contrôlaient Aden depuis 1839. La jeune République Arabe du Yémen au Nord encouragea les sudistes à chasser les Britanniques qui, sous la pression de partis d'opposition (FNL et FLOSY), décidèrent de quitter le pays en 1967. 
Le Yémen du Sud, indépendant mais livré à lui même et sans ressource, trouva rapidement une alliance avec le bloc socialiste.
Le FNL, après avoir évincé son adversaire politique le FLOSY, évolua du nassérisme au marxisme-léninisme. Le 30 novembre 1970, la République Démocratique et Populaire du Yémen fut proclamée : l'épuration des cadres provoqua une vague d'exil.
Au nord, le capitalisme apparaît tandis que le Sud, aidé par l'URSS, s'oriente dans une voie socialiste atypique dans le monde arabe.

A Sana'a, Al Rryani, président du conseil depuis 67, démissione en juin 74. Il est remplacé par le colonel al Hamdi qui instaure un régime militaire en vue de rétablir l'ordre. Al Hamdi, qui défend l'idée d'un rapprochement avec Aden (ce qui déplait fortement aux Saoudiens), est assassiné le 11 octobre 77.
Sous al Gachmi, son successeur, le pays tombe progressivement dans l'anarchie, les Saoudiens soutenant les tribus rivales au nord. Le 24 juin 78, al Gachmi est assassiné par l'explosion d'une malette. Il est remplacé en juillet 78 par Ali Abdallah Saleh, toujours en poste depuis.

Au sud le 11 octobre 78, la partie dure crée le parti unique du PSY (parti socialiste yéménite). Ismaël, rentré d'exil en février 85, fomente un coup d'Etat le 13 janvier 86 contre le président Nasser. Les deux factions rivales marxistes s'affrontent quelques jours et le bilan est terrible à Aden : 16000 morts, 10 à 15000 exilés, dont Nasser.
Ismaël est mort aussi. Al Bid devient président du PSY, et le Yémen du sud s'enfonce encore plus dans le misère.

Des guerres fratricides, reflet parfois de la guerre froide, ponctueront les relations entre les deux Yémen , mais l'idée unitaire et sa quête sans cesse renouvelée aboutira en 1990.




Depuis la réunification en 1990 : entre troubles et stabilité

Le 22 mai 1990, à la faveur de la fin de la guerre froide, le rêve unitaire de nombreux yéménites devient réalité avec la proclamation de la République du Yémen. Après les larmes et le sang, la fraternité semble l'avoir définitivement remportée. Le nouvel Etat est le plus peuplé de la Péninsule Arabique : 14 ou 15 millions d'habitants, c'est à dire autant que tous les autres pays de la Péninsule réunis. Mais l'unité, fruit de la volonté populaire, de la chute du mur de Berlin et des découvertes pétrolières, suscite un enthousiasme que la guerre du Golfe viendra briser.

Par les hasards de l'alphabet, lorsque l'Iraq le 2 août 1990 s'empare du Koweit, le Yémen dispose d'un siège au Conseil de Sécurité de l'ONU. Sa position neutraliste : "retrait de l'Iraq, refus de troupes non arabes dans la région ", lui vaudra la mise en quarantaine par une communauté internationale influencée par l'Arabie Saoudite et les Etats-Unis.

La réunification yéménite est pour celle-ci plus grave que l'absorption du Koweit par l'Iraq.
L'expulsion d'Arabie Saoudite d'environ 400 000 travailleurs yéménites, l'interruption de l'aide arabe et de l'aide internationale conduisent le pays au bord de la banqueroute. 

Le 27 avril 1993, les première élections se déroulent sans problème : sur les 301 sièges de l'assemblée, le Congrés Général du Peuple (parti du président Saleh) obtient 28,25 %, le Parti Socialiste Yéménite, héritié du PSY sudiste, 18%, et le parti islamiste Islah, proche des tribus du nord, 17%. Deux femmes accèdent au parlement.

Le Parti Socialiste Yéménite, partenaire du Congrés Général Populaire dans l'oeuvre d'unification, tente de capitaliser le mécontentement populaire et s'oppose de plus en plus au Président Ali Abdallah Saleh coupable à ses yeux de favoriser la corruption, de ne pas s'attaquer aux problèmes réels du pays. Al bid, ancien président du sud, soutenu par Ryad et le Koweit, soutient l'idée d'une sécession. Devant la gravité de la situation, des personnalités indépendantes, des syndicalistes multiplient les tables rondes, les réunions, les conciliabules pour tenter d'éviter l'impensable : une sécession sudiste.

Au début 1994, un accord très détaillé est signé à Amman (Jordanie), sous l'égide du roi Hussein. Bien accueillie par les yéménites qui y voient la fin de la crise, cet accord ne sera jamais appliqué.
Dès le lendemain de la signature, les 27 et 28 avril 94, des affrontements opposent des unités nordistes et des unités sudistes. Désormais, la résolution de la crise yéménite se fera par la guerre.
Les 4 et 5 mai, Sana'a subit des raids. Le 5 mai 1994 au soir, pour déjouer les préparatifs de sécession, les troupes nordistes déclarent les hostilités. Elles progressent difficilement en direction d'Aden et du Hadramaout, via Shabwah dont les richesses pétrolières aiguisent des convoitises. 
Al Bid annonce la création de la République Démocratique du Yémen le 21 mai 94.
Finalement, le 7 juillet, Aden est prise. Le Yémen reste unifié. Les dirigeants socialistes vaincus, Al Bid et Al Attas, selon une séquence bien connue de l'histoire yéménite, sont contraints de prendre le chemin de l'exil. L'Arabie Saoudite, qui soutient financièrement la dissidence, sera leur terre d'asile.

La guerre a pour effet premier de mettre un terme au partenariat égalitaire entre dirigeants du nord et dirigeants du sud, et donc de supprimer un axe de tension. L'hégémonie nordiste, conséquence de l'échec de ce coup d'état, devient le coeur du nouveau Yémen et c'est sous son égide que le pays sera gouverné. Mais la situation économique s'est aggravée du fait même de la guerre, et le pays n'a pas rétabli toutes les relations avec ses bailleurs de fonds habituels. De plus, une opposition islamiste a vu le jour, qui entend reprendre le flambeau de la contestation allumée par le PSY (cette contestation, contrairement au FIS en Algérie par exemple, ne se situe pas hors système politique, mais y est intégré par la présence au sein du parti Al Islah, de chefs de tribus et de nombreux notables locaux qui participent au pouvoir).

La guerre ne semble avoir résolu qu'un problème : le pays est désormais unifié et la menace de sécession sudiste n'est plus à l'ordre du jour. L'avenir du pays dépend maintenant de la résolution des problèmes économiques sur le plan intérieur, et du rétablissement de relations cordiales avec les Etats voisins, en particulier l'Arabie Saoudite, ce qui sera réalisé en juin 1995, lors d'une visite du Président Ali Salah à Ryad.

Le pays reprend son rythme de croissance de plus de 7 % par an.
Mais en décembre 1995, alors que le Yémen a les yeux sur sa frontière saoudienne, l'Erythrée envahit l'île de Hanish dans la Mer Rouge. Ce couloir maritime et son détroit de Bab El Manded attirent toujours et encore les convoitises, une fois de plus, le pays est victime de sa position stratégique.
Durant les années qui suivent, le Yémen va ratifier des traités de reconnaissance des frontières avec l'ensemble de ses proches voisins: l'Erythrée, le Sultanant d'Oman et l'Arabie Saoudite (traité de Jeddah le 12/06/2000).
Le pays veut améliorer ses relations internationales, stabiliser la sécurité régionale et développer le tourisme.




Depuis le 11 septembre :

- novembre 2000 : attentats contre le bâtiment ilitaire américains USS Cole en rade à Aden : 17 marins tués.

- 11 septembre 2001: attentats à New-York et Washington : Le président Saleh a immédiatement condamné les attentats du 11 septembre et interdit toute manifestation intempestive.

- 6 octobre 2002 : attentat contre le pétrolier français Limburg, au large de Mukalla  : 1 marin bulgare tué

- décembre 2002 : destruction par un avion furtif américain près de Ma'reb du véhicule d'un des chefs de tribus locales pour complicité avec Al Qaeda.
Assassinat du numéro 2 du parti socialiste yéménite, lors d'une réunion politique avec le parti islamiste Islah.
 




       REPERES CHRONOLOGIQUES  :
  • 30 000 avJC : traces d'occupation à Bab el Mandeb
  • Paléolithique (-12 000 - 5 000 avJC) : matériel récolté dans l'est et le sud
  • Néolithique (5 000 avJC) : foyers de Saada (gravures rupestres)
  • Age du Bronze (3 000 avJC) : fin période gravures et peintures rupestres. Constructions circulaires et tumulus à traïne du Jawf
  • Chalcolithique (-2 000 avJC) : mégalithes dans Hadramaout
  • Ve. siècle av.J.C. : Royaume caravanier de Saba avec Ma'reb comme capitale.
  • IVe. siècle av.J.C. : Issus de Saba, plusieurs royaumes font leur apparition : Ma'in, Qataban, Hadramaout . Commerce de l'encens par voie terrestre
  • IIIe. siècle avJC : royaume minéen domine le commerce de l'encens
  • IIe. siècle avJC : regain du commerce grâce à la demande greque. Guerres continuelles entre les petits royaumes.
  • An 24 av.J.C. : Expédition romaine qui échoue devant Ma'reb.
  • Ier siècle après J.C. : Apparition de la dynastie Himyarite.
  • IIe. siècle après JC : Confrontation Hymiar-Saba
  • IVe. siècle après JC : Hymiar réalise l'unité de l'Arabie du Sud
  • fin du IVe siècle : La dynastie Himiyarite se convertit au judaïsme. Occupation éthiopienne (persécutions chrétiennes)
  • 525 : L'Ethiopie place un himyarite chrétien sur le trône du Yémen.
  • VIe siècle : Effondrement et abandon définitif du barrage de Ma'reb
  • 622 : Exile de Mohammed à Médine : An I de l'Hégire.
  • 628/630 : Début de l'Islam au Yémen.
  • 820 : Fondation de Zébid.
  • 898 : Début de l'Imâmat Zaydite (qui durera jusqu'en 1962).
  • 1516/1538 : Etat circassien du Yémen (Zébid)
  • 1538/1636 : Première occupation ottomane du Yémen.
  • XVIIe siècle : Début du commerce du café avec l'Europe, avec le port de Mokha comme comptoir.
  • 1762 : Expédition de Niebuhr arrive au Yémen.
  • 1839 : Les Anglais s'emparèrent d'Aden.
  • 1849/1918 : Seconde occupation ottomane du Yémen.
  • 26/09/1962 : Proclamation de la République Arabe du Yémen (Yémen du Nord) et début de la guerre civile entre républicains et royalistes.
  • 30/11/1967 : Proclamation de la République Démocratique et Populaire du Yémen (Yémen du Sud).
  • 21/05/1990 : Réunification du Yémen .
  • 05-06/1994 : Conflit entre les ex-armées du Nord et du Sud.Fin des hostilités qui ont mené à la réunification
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